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jeudi 4 août 2011

L’éternel voyageur


« Ô mon Dieu, qu’étais-je avant d’être conçu? Avais-je quelque être, et étais-je quelque part? »
Ces paroles tirées des « Confessions » de Saint Augustin ne résument-elles pas à elles seules l’angoissant questionnement de l’homme sur la précarité de son existence et la conscience plus ou moins nette de n’être qu’un acteur sur la scène de l’existence? Qui sommes-nous, d’où venons-nous et où allons-nous? Parachuté en cette vie sans l’avoir demandé pour un court et chaotique périple d’à peine quelques décennies de durée- pour les plus favorisés d’entre nous -, toute notre existence se passe à essayer de comprendre le sens de ce court voyage.
Le grand psychiatre et psychologue suisse Carl G. Jung affirmait « que l’homme est un être en partie double, dont l’une, la partie consciente, n’a que l’âge du corps, alors que l’autre, la plus importante, la partie inconsciente et supra consciente, a l’âge et l’expérience de millions d’années. » Pareille supposition ne rejoint-elle pas « l’hypothèse de la survivance des âmes qui est celle de la plupart des religions »? comme l’écrivait si bien Maurois?
L’hypothèse chrétienne relative à cette survivance de l’âme après la mort coïncide largement avec celle des religions judaïque, islamique et autres, dont celle de l’ancienne Égypte. Suivant ces doctrines, l’âme de l’homme est issue de Dieu, et ce sont nos parents qui lui donnent la possibilité de s’incarner dans le monde terrestre en cédant à l’appel de la chair. Après sa mort, et un séjour indéterminé dans un « purgatoire » (« Royaume des morts, Schéol, Hadès » et autres), cette âme obtient la félicité éternelle, en récompense d’une vie juste. Dans le cas contraire, celui notamment du péché contre le Saint-Esprit, le Christ précise : « Il ne lui sera pardonné ni en ce monde ni en l’autre. » (Mt Chap. 12, Vers. 32). La Bible parle alors de la géhenne pour cette âme perdue, le séjour des réprouvés.
Mais qu’en est-il exactement de ce mystérieux « purgatoire » qui depuis des siècles alimente tant de spéculations? Une courte recherche nous apprend que c’est « un lieu ou plutôt un état dans lequel les âmes des justes sorties de ce monde sans avoir suffisamment satisfait à la justice divine pour leurs fautes, achèvent de les expier avant d’être admises à jouir du bonheur éternel. » Que ce « purgatoire » existe ou pas, on peut raisonnablement croire que nous aurons à répondre après notre mort des faits et gestes de notre vie présente. Le Christ est encore catégorique à ce sujet : « Tu n’en sortiras pas que tu n’aies remboursé le dernier quadrant. » (Mathieu Chap. 5, Vers. 25-26). Heureusement que ce Rédempteur a pris sur Lui de tout racheter de notre mal, car comme le dit si bien Saint Augustin, « si vous vouliez examiner avec rigueur les péchés des hommes, Seigneur, qui pourrait subsister devant le tribunal de votre justice? »
Admettons ensemble, bien humblement, que ce temps d’expiation risque plutôt d’être long, avec tous ces coins obscurs qui enténèbrent notre vie. Le mal en nous est si profond, si bien établi à demeure dans notre esprit, et ce bien souvent à notre insu, qu’il nous est impossible de le vaincre définitivement sans l’aide de Dieu. Grâce au Christ, on sait maintenant que c’est de notre imperfection, de notre inachèvement que nous viennent toutes nos souffrances. Comme l’écrivait si bien Michel Quoist dans son livre « Réussir », « Au cœur de tout homme se cache la nostalgie de la perfection. Le désir est infini, mais les limites multiples ».
Que l’on soit d’accord avec cette idée de « purgatoire » comme lieu d’expiation pour nos fautes ou, au contraire, que l’on partage plutôt les vues de l’hypothèse évolutionniste spiritualiste des religions orientales et du christianisme primitif, à l’effet que l’âme immortelle de l’homme pérégrine de vie en vie en traversant les portes de la mort et de la naissance où elle se revêt d’un nouveau corps pour se perfectionner d’existence en existence, une question restera toujours sans réponse: Si ma vie actuelle est la résultante de mon passé, de quoi ce passé était-il donc fait? Si ma vie présente n’est pas unique, si je ne vis pas en ce monde pour la première fois, où étais-je donc auparavant? comme se le demandait avec tant d’à-propos Saint Augustin? Qui étais-je? À quelles époques ai-je vécu? Et qu’ai-je donc fait au cours de ces anciennes vies? De quels manquements graves ai-je donc pu me rendre coupable, pour en être toujours là à souffrir dans ce corps périssable, avec toutes mes soifs d’infini?
Si on admet, relativement à cette hypothèse, que je ne suis pas venu au monde blanc comme neige- l’Église nous enseigne que nous venons tous au monde enclins au mal à cause de la faute d’Adam-, mon sort actuel pourrait-il être la conséquence inévitable de la conduite de mes vies précédentes? Et fort de cette connaissance, n’ai-je pas tout intérêt à tout mettre en œuvre dès à présent pour m’élever dans cette voie de la perfection, de la justice, du partage et de l’amour dans laquelle cheminent les justes de ce monde, afin de devenir au plus tôt cet homme divinisé à qui le Ciel est promis en partage comme récompense éternelle?
« Notre civilisation est en danger, écrit encore Michel Quoist. Mais non pas tant à ses frontières géographiques qu’aux frontières mêmes du cœur humain. Le ver rongeur est à l’intérieur; il gagne inexorablement, appâté par les facilités du Monde moderne qui offre au corps la jouissance de la chair, à l’esprit l’orgueil de la puissance. […] Si l’esprit de l’homme sombre en face de la matière triomphante, c’est qu’il oublie, ignore ou nie Dieu. Ainsi le drame se résume : ou bien l’homme s’attache à Dieu en se détachant de la matière, ou bien il s’attache à la matière et se détache de Dieu. […] L’homme “civilisé”  divorce d’avec le vrai Dieu, et malgré ses grandes déclarations, aussi sûrement que par l’élaboration de doctrines athées, bâtit un Monde où il n’y a plus de place pour Dieu. »
Or, comme Dieu est la finalité de notre existence et que toutes nos soifs d’excellence et d’idéal ne sont au fond qu’une seule et même soif d’absolu, la soif de Dieu, ne risquons-nous pas, en nous détournant de Lui, de tourner en rond sur nous-mêmes indéfiniment, écartelé en notre être profond, sans cesse en lutte contre nos frères, chacun pour soi, éternels voyageurs condamnés à une interminable errance pour des siècles et des siècles?
Pourtant, notre guide de conduite existe pour mettre fin à cette errance et arriver à bon port. Ce guide nous a tracé le chemin il y a deux mille ans. « Je suis la Voie, la Vérité et la Vie. Nul ne vient au Père si ce n’est par moi. » (Jean, Chap. l4, Vers. 6). Michel Quoist ajoute «que c’est Dieu qui a mis en nous cette nostalgie de l’achèvement dans l’infini, et que du fond de l’éternité, c’est son amour qui nous fait signe.» Le Christ n’est-il pas l’accomplissement parfait de cet amour infini?
Réincarnation ou « purgatoire », qu’avons-nous vraiment à nous en formaliser, chacun braqué de son côté dans sa perception de la vie après la mort? Dans un cas comme dans l’autre, ne sommes-nous pas condamnés à y expier nos manquements antérieurs? De ce fait, l’important n’est-il pas d’en sortir au plus vite, pour mettre fin au plus tôt à ce cycle interminable de souffrance?
Je laisse le mot de la fin à Pierre Shoendoerffer. Dans son livre, Le Crabe-Tambour, Grand Prix du Roman de l’Académie française 1976, le célèbre écrivain fait dire à un de ses personnages, dans le chapitre intitulé Le Grand Secret : « C’est drôle… c’est très drôle : on n’est pas heureux. Je sais qu’on n’est pas heureux. L’homme n’est pas heureux… Voilà, c’est tout : nul homme n’a été heureux. Jamais! Voilà le secret : il n’y a jamais eu d’homme heureux. Jamais depuis qu’il y a eu des hommes sur la terre, depuis toujours… Jamais!... Vous le saviez, n’est-ce pas?... C’est écrit dans tous les livres… » 

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