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mercredi 20 juillet 2011

Un cauchemar affreux





Épouvantée, terrifiée au point d’être trempée de sueur, Marie se réveille en pleine nuit en poussant un cri horrifié. Elle vient d’être victime d’un cauchemar atroce, si effrayant que pendant un moment elle se demande sérieusement si elle n’a pas été transportée en rêve dans un autre monde. Car ce qu’elle vient de vivre est si épouvantable, qu’il est impossible que cela ait pu se produire ici-bas. Incapable de se rendormir tant elle est encore bouleversée par ce qu’elle vient de vivre, Marie se lève et se prépare un café, afin de forcer sa mémoire à lui restituer l’essentiel de son rêve, tant elle est sûre que ce cauchemar n’est pas sans signification pour elle.
            Se replongeant dans son rêve effrayant, c’est ainsi que Marie voit une vingtaine d’êtres sans visages, bardés d’armes, intercepter un joyeux cortège de parents et amis regroupés en convoi à bord d’une dizaine de véhicules et qui font escorte à un couple de mariés. Rapidement, les assaillants séparent les femmes, les hommes et les enfants, puis violent toutes les femmes, sous les regards horrifiés de leurs conjoints, parents et amis. Ivres de rage et de sang, les attaquants accrochent ensuite un poids autour du cou de chacun des quinze enfants participant à la noce, puis jettent leurs jeunes victimes dans le fleuve qui coule tout à côté. Poursuivant leur œuvre de mort, les immondes brutes violent la mariée sous les yeux de son époux, puis exécute ce dernier d’une balle dans la nuque, faisant de même avec tous les hommes qui assistaient au mariage. Quand, à la fin, rassasiés de leurs crimes odieux, les assassins décident de se retirer, il leur faut encore couper la poitrine de la mariée et la laisser se vider de son sang jusqu’à ce que mort s’en suive, pour être complètement assouvis.
C’était à ce moment précis que Marie s’était réveillée de son horrible cauchemar, alors que les ignobles créatures dont on ne voyait que la bouche haineuse étaient à se pourlécher, tels des fauves venant de se ruer à la curée et encore tout souillés du sang de leurs victimes. Comment son esprit avait-il pu être le siège de pareille horreur, Marie n’en savait rien, ignorant tout des causes possibles de ce rêve effrayant. D’autant plus qu’elle elle n’était pas une adepte des films d’épouvante.
Ce n’était qu’au matin, au lever du jour, que Marie avait commencé à comprendre ce que signifiait vraiment les paroles de Green, quand il écrivait: « Dans la nuit, l’homme s’efface, n’est plus que la conscience de son inconscient. » Comme son travail d’infirmière au service des urgences d’un hôpital régional exigeait d’elle d’interrompre ses activités et de rappliquer en toute hâte lors d’interventions médicales urgentes, Marie avait été rappelée au bloc opératoire en catastrophe la veille au midi, suite à un grave accident de la circulation, ce alors qu’elle était à prendre son repas à la cafétéria de l’hôpital. Et étant donné qu’elle avait pour habitude, tout en mangeant, de parcourir les dernières nouvelles du jour dans un grand quotidien du matin mis à la disposition du personnel, et que son attention avait été requise par un article de presse qui l’avait particulièrement remuée, elle avait demandé à un des employés de la restauration de lui mettre le journal de côté pour le lendemain, afin de pouvoir en compléter sa lecture.
Se remémorant tout à coup sa bouleversante lecture interrompue de la veille, Marie avait enfilé ses vêtements en toute hâte et filé tout droit à la cafétéria de l’hôpital, tant elle était anxieuse de récupérer sa précieuse copie du journal abandonné. La pauvre femme n’avait pas rêvé : son horrible rêve de la nuit précédente n’était pas une invention de son esprit endormi. L’effroyable tuerie qu’elle avait vécue en rêve relevait bien, hélas, de la triste réalité de notre monde déshumanisé. Sous la rubrique : « Condamnés à mort pour un massacre », le journal relatait une épouvantable tuerie qui s’était déroulée en Irak en 2006, au plus fort des violences confessionnelles. Le carnage avait coûté la vie à quelque soixante-dix invités d’un mariage entre un chiite et une sunnite. Les deux époux professaient la même religion, mais étaient de courants religieux différents, ce qui traditionnellement, en Irak, donne lieu à des points de désaccord et même à de l’hostilité entre les deux mouvements de pensée. Aucun témoin gênant n’avait été laissé derrière. Personne n’avait été épargné : les dépouilles de toutes les victimes avaient été jetées dans le Tigre!
Suite à une laborieuse enquête de police, vingt-cinq membres présumés d’une cellule d’Al-Quaïda avaient été arrêtés par les forces irakiennes. Et de ce nombre, quinze venaient d’être condamnés à mort pour ce massacre, cinq ans après les faits. Et ô surprise, les monstres avaient tous visage humain. Et même que l’un de leurs chefs était le dirigeant d’une organisation vouée à la reconnaissance des droits de l’homme. L’ONG en question avait pignon sur rue et était engagée dans la défense des droits des prisonniers..! N’était-ce pas la preuve, une fois de plus, que le mal absolu pouvait dissimuler ses crimes sous les plus beaux airs de vertu?
Encore toute bouleversée, Marie aurait voulu crier sa révolte au monde entier si elle en avait eu le pouvoir. Comment pouvait-on tolérer pareilles horreurs, se disait-elle, vivre au milieu de pareilles ténèbres de l’esprit, endurer jour après jour d’aussi atroces persécutions, sans devenir complètement enragé? Comment était-ce possible de garder sa foi dans l’homme, après de tels actes de barbarie? Comment pouvait-on continuer à vaquer tranquillement à ses occupations comme si rien de tout cela n’avait d’importance? À qui confier son désarroi, sans risquer une boutade du genre: « Du calme, Marie, détends-toi, ces gens-là ne vivent pas sur la même planète que nous! Leurs problèmes, on n’en a rien à foutre! Ici, tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil! »
Alors qu’au cours de la journée Marie implorait le Ciel de l’aider à trouver une réponse positive à sa détresse, tant il lui semblait qu’en ce monde le non-sens prenait le pas sur le bon sens et la raison, elle avait pris conscience soudainement que le Christ avait été mis à mort suite à des accusations découlant de semblable obscurantisme religieux chez ses persécuteurs. Et pourtant, n’avait-il pas prêché jusqu’à la fin l’amour des ennemis, enseigné la nécessité de prier pour ceux qui nous persécutent?   
Et alors qu’elle en était encore à se questionner sur l’attitude à adopter face à de pareilles horreurs, incapable de croire que l’on puisse en venir à se plier à un tel commandement de l’amour pour ses bourreaux, Marie avait pris conscience tout à coup que son défunt père avait fait sienne cette prescription de prier pour ses ennemis, des années plus tôt. Alors jeune journaliste débutant à l’époque pour le compte d’un grand quotidien du soir, son paternel avait été l’objet de l’irascibilité d’un collègue de travail au caractère emporté qui lui avait empoisonné la vie pendant de nombreuses années. Ce jusqu’au jour, où en désespoir de cause, il lui était venu à l’esprit de chercher du réconfort du côté de l’Évangile, pour solutionner son problème.
Demandant au Ciel, dans une courte prière, d’aider son tourmenteur à trouver la paix de l’esprit, particulièrement les jours où ce dernier lui semblait encore plus irritable qu’à l’accoutumée, en quelques mois son père avait vu les difficultés de communication grandement s’atténuer entre lui et son difficile confrère. Non seulement l’irascibilité de ce dernier avait-elle cessé, mais elle avait même fait place à de l’amabilité. Si bien que les deux hommes en étaient venus à s’apprécier, au point même de partager des confidences et de prendre plaisir à deviser familièrement de choses et d’autres, lors de leurs pauses repas.
Comme Marie était convaincue qu’elle se devait de tout mettre en œuvre pour tenter de mettre fin à de pareilles horreurs, et cela malgré le fait que tout en elle clamait du non-sens de ses aspirations face à la démesure de la tâche à accomplir, elle s’employait à faire ce qu’elle avait fait de mieux depuis toujours, quand elle se voyait particulièrement démunie face à une situation éprouvante qui lui semblait sans issue : se tourner vers le Ciel pour implorer son aide.
Et alors qu’elle aurait cru la chose impensable à venir jusque là, Marie se mettait à prier pour tous ces monstres sans visages dont le cœur n’était plus que vide et obscurité à force de haine et d’exécration. Pour que la lumière en vienne à percer les ténèbres de leur nuit profonde. Son Dieu saurait bien écouter ses prières. L’avait-il déjà trompée? N’ayant aucune prétention sur sa petite personne, elle s’abandonnait donc avec confiance. L’important pour elle, c’était qu’un de ces bourreaux sans visages en vienne peut-être à épargner sa victime au dernier instant dans le futur, pris de doute ou de remords devant la monstruosité de son geste, touché par quelque mystérieuse grâce dont évidemment elle ne saurait jamais rien. Du moins pas en ce monde. Mais quelle importance cela avait-il? Une des choses que sa foi lui avait apprise, c’était que la prière formulée avec un cœur pur avait un pouvoir de persuasion certain sur le cœur de Dieu. Et son espérance n’était pas de sauver le monde, mais une vie si possible, une seule vie…
Et pourtant, le Talmud n’enseigne-t-il pas que « celui qui sauve une seule vie sauve le monde entier?»

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