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samedi 7 janvier 2012

Le massacre des Innocents

    D’entrée de jeu, il m’apparaît opportun de préciser, avant d’aborder ce sujet, que l’Histoire, bien qu’elle accorde une grande place à Hérode et à son règne, ne fait pas mention de cette tuerie. La raison, semble-t-il, pourrait en être que le « massacre des Innocents » n’est qu’un exemple des crimes attribués à Hérode le Grand. Avant de voir de quoi il en retourne exactement, voyons ce qu’en dit l’évangéliste Matthieu.
« Après leur départ (les Mages), voici qu’un ange du Seigneur apparut à Joseph disant : “ Lève-toi, prends l’enfant et sa mère, fuis en Égypte et restes-y jusqu’à nouvel ordre. Car Hérode va chercher l’enfant pour le faire périr.” Joseph se leva, prit l’enfant et la mère durant la nuit et partit pour l’Égypte, et il y resta jusqu’à la mort d’Hérode, afin que s’accomplit la parole du Seigneur disant par la bouche du prophète : D’Égypte j’ai appelé mon fils. Alors Hérode, voyant qu’il avait été joué par les Mages, entra dans une violente colère et il envoya tuer tous les enfants de Bethléem et de son territoire entier, depuis l’âge de deux ans et au-dessus, selon le temps dont il s’était soigneusement informé auprès des Mages. Alors s’accomplit la parole du prophète Jérémie : Une voix a été entendue à Rama, des pleurs et des sanglots sans nombre : c’est Rachel qui pleure ses enfants et elle refuse d’être consolée, parce qu’ils ne sont plus. »
Ici, une autre précision s’impose : il s’agit d’enfants mâles âgés de deux ans au moins, c'est-à-dire tous ceux qui étaient nés aux alentours de Bethléem depuis la première apparition de l’« étoile ». Selon les estimations du nombre d’habitants vivant à Bethléem au I er siècle apr. J.-C., soit environs 2,000 personnes, on croit généralement qu’il y eut une vingtaine d’enfants de cet âge à être massacrés par Hérode, dans l’espoir de faire disparaître ce nouveau roi des Juifs dont les Mages étaient venus annoncer la naissance au roi vieillissant.
Voyons maintenant si Hérode était bien à la hauteur de cette réputation de tyran cruel qui le faisait désigner par les scribes pharisiens comme le « fléau de Dieu appelé pour punir les péchés du peuple. » Tout à la fois « juif, iduméen, romain et grec » par sa personnalité de caméléon, on sait qu’il fut un conquérant sans pitié et un tyran néanmoins plutôt bienveillant, bien qu’il se montra capable d’exécutions en masse et de meurtres parmi les plus cruels. Ainsi, dès les premiers jours de son règne, il écarta et fit exécuter de nombreux membres de l’opposition. En faisant supplicier notamment la plupart des membres du Sanhédrin- l’une de ses premières décisions-, il élimina du coup les chefs de familles très influentes. S’étant débarrassé de ce fait de ses ennemis au sein du Conseil national autorisé à régler les litiges religieux et civils, il y nomma ses fidèles à la place, pour en faire l’instrument de sa politique.
Le « massacre des Innocents » est tout à fait en accord avec ce que l’on connaît de son caractère cruel. Ainsi on sait que tyran ordonna, sur des rapports non fondés, l’exécution d’au moins cinq membres de sa famille, dont trois de ses fils, sans compter un grand nombre d’ennemis réels ou imaginaires, du fait qu’il avait déjà failli être la victime de plusieurs complots.
Hérode, à quelque soixante-cinq ans, était sérieusement malade, physiquement et mentalement. Soupçonneux, se laissant facilement convaincre par les ragots empoisonnés de sa cour, il voyait des ennemis partout. Obsédé par les intrigues de ses femmes et de ses enfants, il commençait à perdre le contrôle de son royaume. « Aucun de ceux qui sont assoiffés de mon sang ne m’échappera, dussé-je voir exécuter tous mes enfants », s’était-il écrié, fou de rage, lors du procès de son fils Antipater qu’il accusait d’avoir complété en vue de le faire empoisonner, devant le tribunal du gouverneur romain de Syrie.
Dans les derniers jours de sa vie, craignant que sa mort ne fût pas suffisamment pleurée, Hérode donnait encore à son royaume une bonne raison de le craindre par-dessus tout. Dans sa folie grandissante, il conviait les notable juifs de tout le territoire de Jérusalem et les faisait enfermer dans l’hippodrome. Puis, tyrannique jusqu’à son dernier souffle, il donnait l’ordre de les massacrer tous, après sa mort. Et il faisait de même avec Antipater, ordonnant à ses plus fidèles gardes du corps de le tuer, pour être bien certain qu’il ne lui survivrait pas. Informé de ce geste cruel plus tard, on rapporte que l’empereur Auguste aurait déclaré : « Mieux vaut être le porc d’Hérode que son fils ! »
Si toute cette série d’intrigues, de meurtres et d’exécutions dans la famille d’Hérode nous a été rapportée par l’Histoire, pourquoi n’en a-t-il pas été de même pour le « massacre des Innocents » survenu dans les derniers temps de vie du tyran ? Peut-être, en y réfléchissant de près, qu’on pourrait émettre une hypothèse sur la question. Combien de crimes sordides au cours de l’Histoire n’ont jamais été répertoriés dans les annales du règne de certains dirigeants particulièrement rapaces, pour raison d’État ? Des dizaines de milliers, sans aucun doute.
Tuer des opposants politiques, entendons-nous, n’entraîne pas les mêmes répercussions au plan moral que le massacre d’enfants innocents. Aussi pareil crime était-il susceptible de ternir à jamais l’image de la dynastie régnante des Hérode, et même entraîner sa condamnation par Rome, à l’instant où l’affaire serait venue aux oreilles de César. Dans pareil cas, l’Empereur aurait pu résilier le testament du tyran à sa mort, et priver ainsi ses héritiers, Archélaos, Hérode Antipas et Hérode Philippe de leur part d’héritage du royaume, avec tout ce que cela impliquait comme titres, honneurs et richesses, devant la tournure que l’affaire aurait pu prendre. À preuve, le personnage du roi Hérode vieillissant et son horrible stratagème pour protéger son trône n’ont-ils pas enflammé l’imagination de centaines de millions de chrétiens depuis deux mille ans ?
La pression sur Hérode aurait pu venir également du Haut clergé juif. En dénonçant publiquement ce crime monstrueux, par exemple, les chefs religieux auraient eu enfin l’occasion de prendre leur revanche pour tous les crimes que le despote avait perpétrés dans leurs rangs. Après tout, c’était des enfants juifs qui avaient été massacrés, et par un Iduméen irréligieux contesté depuis les tout débuts de son accession au trône, par l’élite religieuse de Jérusalem. Les Romains étaient très sensibles au fait d’immoler des enfants, et cela pour quelque raison que ce fût. N’avaient-ils pas mis fin, notamment, aux sacrifices sanglants des druides, lors de la conquête de la Gaule ?
Comme ne pas imaginer alors que cette tuerie ait pu être confiée à quelques exécutants des basses œuvres du vil despote, déguisés peut-être en brigands pour la circonstance et frappant de préférence de nuit pour kidnapper leurs jeunes victimes au lit dans un premier temps, puis les éliminer en douce par la suite, loin des regards indiscrets… Et qui sait, peut-être bien aussi d’une façon non sanglante, afin de provoquer le moins d’émoi possible au sein de la populace de Bethléem, une fois leur coup fait…
Quoi qu’il en soit, les héritiers d’Hérode avaient tout intérêt à ce que ce crime sordide demeure secret d’État et ne figure à nulle part dans les registres du Royaume. L’élimination physique de ce concurrent à leur trône leur garantissait le pouvoir, et ce aussi longtemps qu’ils continueraient à œuvrer pour se concilier les bonnes grâces de Rome. Bethléem étant peu de chose à l’échelle de la Palestine, on peut imaginer sans peine que l’affaire fût peu ébruitée. De ce fait, il n’y avait guère de chance dans le futur pour que cette tuerie remonte à la surface, et que le peuple en demande des comptes, devant la mort possible de l’enfant prédestiné dont les Mages avaient annoncé à leur arrivée à Jérusalem qu’il serait le roi des Juifs.
Comment expliquer alors que ce massacre sans doute ignoré de la majorité jusque là, ait pu être porté à l’attention des premiers chrétiens par Matthieu ? Matthieu, connu aussi le nom de Lévi par les évangélistes Marc et Luc, est ce publicain qui abandonna un jour son travail à Capharnaüm, en voyant passer Jésus qui lui dit : « Suis-moi ! » Et chose importante, on pense qu’il est bien l’auteur de l’évangile qui porte son nom.
Si tel est le cas, Matthieu côtoya donc Jésus pendant trois ans. Le Christ pourrait bien être de ce fait à l’origine de cette information sur les circonstances de ce massacre. Joseph et Marie, à leur retour d’Égypte, durent certes chercher à savoir s’il s’était passé des choses à Bethléem, après leur départ. Ne serait-ce que pour vérifier la pertinence de la mise en garde dont ils avaient été l’objet de la part de l’ange, lorsque celui-ci était venu les prévenir qu’Hérode avait décidé de faire mourir leur nouveau-né. Qu’ils eussent plus tard informé leur fils de cette tentative d’assassinat sur sa personne m’apparaît tout à fait pertinent.
Au cours de son ministère, l’Évangile nous raconte qu’à trois reprises au moins, on tenta de tuer Jésus, avant de le faire périr en croix. Le Christ était marqué du sceau de la mort dès sa naissance, parce qu’Il était appelé par le sacrifice de sa vie à la vaincre !
Pour conclure, les historiens pensent que Joseph a pu trouver du travail comme menuisier ou autre travail connexe, lors de son exil en Égypte. Et sa petite famille dut certes être bien accueillie dans cette terre d’asile, car au I er siècle après. J.-C, on estime qu’environ un million de Juifs y vivaient, participant avec succès à la vie économique de ce pays prospère. Après la mort d’Hérode le Grand, Joseph et sa famille rentrèrent chez eux en Galilée. Ils durent à leur retour traverser les austères déserts du Sinaï et du Néguev, mais ils évitèrent surtout de passer par la Judée, du fait qu’elle était aux mains de l’ambitieux fils du défunt tyran, Archélaos, ethnarque exilé en Gaule quelques années plus tard par l’Empereur Auguste, en raison de son règne décrit comme des plus tyranniques et des plus sanguinaires.

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